Voici venu le temps de vous conter l’histoire de la société Pebble, pionnière sur le secteur de la montre connectée et finalement malheureuse…
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Tout débute il y a déjà de nombreuses années au début des années 2010. Plusieurs personnes, aux USA, imaginent une montre d’un nouveau genre. Il y a en particulier Eric Migicovsky qui va rencontrer l’incubateur Y Combinator en Californie. L’alchimie est bien présente et Eric Migicovsky peut développer son concept.
La montre repensée ne donnera pas seulement l’heure, elle devra aussi permettre de proposer des applications connectées à Internet depuis le poignet. Mais, la fonction la plus importante du moment consiste à afficher les SMS sur le petit écran de la montre.
Clairement le concept est révolutionnaire. C’est du jamais vu. Mais les jeunes gens sont enthousiastes et décident de créer rapidement une entreprise qui sera chargée de créer le premier prototype de cette montre.
Allerta est née. Le contact est prit avec Tim Draper auprès duquel Pebble arrive à lever $375 000. Mais, l’entreprise échoue à obtenir plus de fonds, auprès d’autres investisseurs, pour développer plus en avant le concept et son prototype.
La montre s’appelle maintenant Pebble et est pratiquement terminée. Il ne manque plus qu’un peu d’argent frais pour terminer les tests et commercialiser la montre connectée qui s’annonce comme une véritable révolution. Nous sommes en 2012.
Il faut pourtant attendre avril 2012 pour que les geeks fans de high-tech apprennent l’existence de l’entreprise.
A ce moment, et faute d’avoir convaincu de nouveaux investisseurs privés, l’entreprise a l’idée d’utiliser un nouveau service appelé Kickstarter.
Le but est donc de « pré-vendre » le concept et la montre Pebble aux clients finaux. Ensuite, et avec l’argent récolté, il sera possible de terminer la montre et de lancer sa fabrication de masse.
Le calcul est fait et l’entreprise estime qu’il manque $100 000 pour commencer la commercialisation. C’est ce montant qui sera défini alors comme objectif au moment de la création de la campagne Kickstarter.
Le prix de la montre Pebble est alors fixée à $99 pour les 200 premiers acheteurs et $115 pour les suivants.
La compagnie estime qu’en convainquant un millier de personne, le concept sera validé pour une commercialisation à plus grande échelle et plus traditionnelle au prix de $150.
Le succès est alors sans précédent : seulement deux heures après le début de la campagne, le montant des $100 000 est franchi.
Mieux, au bout de 30 jours, c’est à dire une fois la campagne de financement participative Kickstarter terminée, Pebble a vendu et récolté 4,7 millions de dollars.
Cette fois, Pebble est devenue une marque connue dans le monde entier.
De l’extérieur, tout va pour le mieux. L’argent frais vient tout changer et les responsables de Pebble semblent optimistes.
Mais de l’intérieur, c’est la douche froide. En effet, les problèmes de production et de fabrication se succèdent et semble ne plus finir.
Alors que le montre devait être expédiée aux acheteurs en septembre 2012, ceux-ci n’ont toujours rien reçu à la fin de l’année 2012. De plus, on lit de plus en plus de messages d’acheteurs inquiets ou agacés sur des blogs et les réseaux sociaux.
Finalement, les premiers envois ont lieu en janvier 2013.
En 2013, l’entreprise arrive à expédier 300 000 montres.
Maintenant que le concept est sur le marché, l’entreprise commence par vendre normalement sa montre sur Internet.
Mais, elle cherche aussi des distributeurs pour mettre la montre en rayon et faire plus de vente pour se développer rapidement.
Là encore, ce ne sera pas chose facile. Beaucoup considère cette montre comme un gadget et elle pose un problème de positionnement produit dans les grands magasins.
Il s’agit d’une montre connectée à un smartphone : donc où placer cet objet ? Faut-il le mettre dans le rayon des montres ou dans celui des smartphones ?
Heureusement, un accord est finalement conclu avec la grande chaîne de magasins Best Buy aux USA. Avec ses dizaines de magasins qui distribuent enfin la montre Pebble, les ventes décollent. Mais pas suffisamment.
Depuis 2013, le concept Pebble n’évolue pas. Mais la montre est fabriquée en plastique et on identifie qu’une version plus « luxueuse » en acier serait peut-être plus intéressante aux yeux des consommateurs.
Une nouvelle « Pebble Steel » est alors annoncée au CES de Las Vegas en janvier 2014.
Mais, déjà, la concurrence se profile et on entend beaucoup parler de l’arrivée de Apple sur le marché de la montre connectée.
Il est donc temps de passer à la génération suivante de montre.
A l’automne 2014, Apple annonce l’Apple Watch. La montre est belle, fonctionnelle et a tout pour éclipser rapidement Pebble de l’esprit des geeks enthousiastes qui avaient fait confiance à l’entreprise il y a deux ans.
Heureusement, Pebble recrute et travaille dur pour présenter rapidement sa deuxième génération de montres connectées : la Pebble Time.
L’annonce est faite au début de l’année 2015. Mais, est-il déjà trop tard ? Cette pensée trotte en effet dans l’esprit de nombreux observateurs.
Pourtant, la Pebble Time a des atouts : tout d’abord son prix, il est beaucoup plus abordable que celui de l’Apple. Elle a aussi une autonomie d’une semaine et les anciennes applications Pebble restent compatibles.
Mieux, et contrairement à la première version de la montre, elle a cette fois un écran couleur. Certes, il est bien moins beau que celui d’Apple, mais on pense qu’il fera l’affaire.
Pour se rassurer (et obtenir une belle campagne de presse), on décide d’adopter la même stratégie que pour la première montre Pebble.
Une campagne Kickstarter est donc lancée en février 2015. Celle-ci sera une nouvelle fois un succès sans précédent puisque un million de dollars sera récolté en moins d’une heure (49 minutes après le lancement).
Le timing est de plus parfait, car Apple n’a pas prévu de sortir sa montre avant avril 2015. Eux aussi ont du se rendre compte que fabriqué ce type d’appareil était plus complexe que prévu…
En même temps, on prépare une Pebble Time Steel (avec boîtier métal et autonomie de 10 jours) ainsi qu’une Pebble Time Round (avec écran circulaire et boîtier plus fin) pour tenter de séduire une nouvelle clientèle : les femmes.
Pourtant, si l’année 2015 est l’année de tous les espoirs, le drame se profile déjà à l’horizon. Et cet horizon se rapproche dangereusement.
Bien qu’analysé et anticipé avec brio – en tout cas c’est ce qu’on pense à ce moment – la montre d’Apple sort en avril 2015 et écrase tout sur son passage : sans être le carton annoncé, c’est quand même un succès.
Et, pour ne rien arrangé, l’Apple Watch se positionne comme un objet mode. Celui-ci est même commenté comme étant beaucoup plus beau et séduisant que la concurrence – Pebble compris.
Alors que Pebble se targue d’avoir vendu plus d’un million de montres connectées au début de l’année 2015, il semble qu’Apple ait fait mieux en moins d’une semaine. L’orage arrive…
Pour ne rien arranger les choses, les problèmes de production ressurgissent du côté de Pebble.
Mais, cette fois, le problème n’est pas technique puisqu’il est purement et simplement financier.
L’entreprise manque en effet de liquidité et a du mal à obtenir un prêt de 5 millions de dollars qui lui permettrait de payer un fournisseur à même de fabriquer les montres.
Même du côté de la Silicon Valley, on pense que ce marché est encore trop risqué – à juste titre. Pebble commence alors à tirer la langue.
Car si l’entreprise n’arrive pas rapidement à mettre ses montres entre les mains du plus grand nombre, comment lutter contre un mastodonte comme Apple et ses montres à $400 ?
A ce moment, on commence à savoir ce qu’il se passe chez Pebble. Si la Pebble Time Round a réussi à voir le jour à la fin de l’année 2015, les difficultés financières sont toujours bien présentes.
On apprend alors, courant 2016, que des licenciements ont lieu chez Pebble. Quarante personnes quittent l’entreprise en mars 2016.
Pourtant, l’entreprise lance une nouvelle version de sa montre avec écran couleur : la Pebble Time 2.
La stratégie semble plus claire maintenant : il est nécessaire de faire de la montre connectée un instrument utile aux sportifs. On espère ainsi surfer sur l’explosition du marché des traqueur d’activité et des coach virtuels de chez Fitbit, Misfit, Jawbone ou encore Garmin.
Les ingénieurs ajoutent alors un cardiofréquencemètre à la Pebble Time 2 et des fonctions plus sportives.
Mais le PDG de Pebble, qui est toujours Eric Migicovsky, se veut rassurant. Il admet des erreurs de gestion financière et plaide coupable d’avoir voulu grossir très vite. Sa masse salariale a donc augmenté plus vite que les ventes de montres connectées Pebble.
Mais, cette fois, on est sur du long terme et le plan visant à se recentrer sur les activités et produits sportifs est cohérent avec le marché – qui est en développement.
Évidemment, Apple commence aussi au même moment à présenter sa montre plus comme un accessoire pour sportifs que comme une extension de son smartphone…
En décembre 2016, l’info tombe : Fitbit achète Pebble pour 23 millions de dollars.
Fitbit décide alors plus tard de tuer la marque Pebble. Le 30 juin 2018, les produits et services associés aux montre Pebble cesseront définitivement de fonctionner.
Fitbit va alors reprendre une partie de la technologie développée et de lancer une nouvelle montre connectée : la Fibit Ionic.
Mais c’est une autre histoire…